Comment un village espagnol est devenu un symbole d’autonomie économique, politique et sociale?
Marinaleda est un village andalou, dans le sud de l’Espagne, de 2.700 habitants. Ici, il n’y a pas de policiers ni de voleurs. Le chômage est plus faible qu’ailleurs, et le travail est partagé. Pour certains, le loyer est à 15 euros par mois. Le maire et ses adjoints ne sont pas rémunérés, et ce sont les habitants qui commandent.
En 1979, date de l’élection de l’actuel maire, le village n’est parcouru que de chemins de terre desservant de misérables habitations. Une petite école primaire mais aucun collège contribue seule, à améliorer le sort d’une population en grande partie analphabète.
La lutte des ouvriers agricoles de Marinaleda pour récupérer les terres à l’abandon d’un grand propriétaire agricole, riche aristocrate et proche ami du Roi démarre en 1976. Leur slogan : la terre appartient à ceux qui la travaillent.
En 1991, après des années d’occupation des terres, d’action dans des gares, des banques, une grève de la faim de 700 villageois, l’Etat cède et exproprie le Duc de 1250 hectares de terrains pour les donner au village. Les villageois plantent des centaines d’oliviers pour enrichir leur patrimoine et se mettent à produire de l’huile de façon coopérative. Il n’y a pas de patron et les ouvriers agricoles (85% de la population active) perçoivent tous le même salaire : 1250 euros par mois ici comme dans la conserverie d’artichauts, poivrons qu’ils construisent, on répartit le travail en fonction du nombre de volontaires disponibles.
« Les bénéfices de la coopérative ne sont pas distribués, mais réinvestis pour créer du travail. Ça a l’air si simple, mais c’est pour cela que le village est connu pour ne pas souffrir du chômage. »
Juan Manuel Sanchez Gordillo, charismatique Prof d’histoire et syndicaliste, élu à 27 ans plus jeune maire d’Espagne, porte cette utopie.
Au village et plusieurs fois par mois toutes les décisions sont prises de manière collective. Le village se réunit en assemblées générales pour débattre, et voter à main levée : impôts, transports en commun, horaires de la piscine municipale…
Et pour lutter contre la spéculation immobilière, ce sont les habitants eux-mêmes qui construisent leur maison ! La mairie fournit le terrain, la région les matériaux, un projet d’architecte et deux maçons… en échange de leur implication (qui représente environ 50% du coût final de leur logement, en moyenne 25 000 euros) les citoyens remboursent un loyer au prix dérisoire : 15 euros par mois. 350 logements ont déjà été construits, une nouvelle tranche de 50 maisons vient d’être lancée.
Pour aller plus loin:
Documentaire visible sur le site des Mutins de Pangée