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Ledru-Rollin, défenseur de la démocratie directe

Ledru-Rollin
Qui était Ledru Rollin et pourquoi l’histoire a-t-elle retenu son nom? Pourquoi des pans entiers de sa pensée concernant la démocratie directe ont-ils été engloutis par les poubelles de l’histoire?

Né en 1807, Alexandre-Auguste Ledru-Rollin est avocat puis député républicain sous la monarchie de juillet. En 1846, il publie un manifeste dans lequel il réclame le suffrage universel ce qui lui vaut un procès retentissant. Nommé ministre de l’intérieur dans le gouvernement qui suit la révolution de février 1848, il propose l’adoption du suffrage universel masculin – à tous les citoyens sans conditions de capacité ou de fortune – adoptée en mars 1848. L’élection de Louis-Napoléon Bonaparte à la fonction de président de la république inaugurera le dispositif. Expérience amère pour ses promoteurs. En juin 1849 Ledru-Rollin, chef du groupe des montagnards comptant plus de 200 députés, participe à une tentative de renversement du gouvernement conservateur. En cause, l’offensive militaire déclenchée contre Rome sans consultation préalable de l’assemblée en violation de la Constitution.  Exilé en Angleterre, Ledru-Rollin embrasse les idées de démocratie directe relativement en vogue à cette époque (Victor Considérant, Moritz Rittinghausen). Voici reproduit le texte de la brochure parue en 1851.

Du gouvernement direct du peuple par Alexandre-Auguste Ledru-Rollin (1851)

Il faut que ce principe du gouvernement direct du Peuple ait une grande virtualité, et frappe par son évidence même, pour qu’il ait fait, en si peu de temps, un si rapide chemin. Proclamé en octobre, d’un coin de l’exil, le voici, aujourd’hui, posé, accepté, soutenu dans la plupart des grandes villes, dans la majorité des centres importants, malgré les diatribes insensées de la presse royaliste et le silence systématique des prétendus journaux républicains de Paris. Il y a même cela de remarquable et d’heureux à la fois, que les feuilles des départements, toujours pleines de patriotisme et de courage, mais un peu trop accoutumées à attendre le mot d’ordre de la capitale, ont, dans cette circonstance, brisé un joug mortel à toute initiative, et marché de leur propre mouvement.

II ne manque donc aucun genre de succès au principe que nous soutenons, pas même, on le croirait à peine, celui d’un acquittement, en Algérie, par une magistrature amovible, décidant sans jurés, sur la terre de l’arbitraire et du despotisme.

Du reste, cette célérité de propagande, celle spontanéité d’adhésions, n’ont rien qui doive surprendre, car le dogme de la souveraineté vivante, agissante, du Peuple dort, depuis les républiques de la Grèce et de Rome, au fond de la conscience humaine; il ne fallait, pour en réveiller le souvenir, que l’impuissance bien constatée des autres modes de gouvernement. Féodalité, monarchie absolue ou tempérée, systèmes constitutionnels de pondération et d’équilibre, représentations à quelque titre que ce soit, une fois condamnés irrémissiblement par l’expérience, le gouvernement du Peuple n’était plus seulement une déduction logique de l’esprit, une affaire de raison ou de choix, il sortait, inévitablement, de la nécessité, comme la dernière forme d’ordre et de sécurité possible pour les Etats. Après avoir parcouru le cercle, il fallait fatalement en revenir à l’idée rudimentaire, avec cette seule différence que, sous la main du temps, le cercle s’est élargi, et que la règle, autrefois applicable à un certain nombre de citoyens, s’étendra, désormais, à la nation toute entière.

Non, l’idée du gouvernement direct du Peuple n’est point une révélation d’hier, et si, pour notre compte, nous avons tenu à démontrer que ses lois avaient été posées, chez nous, par le 18e siècle, par Montesquieu, par Rousseau, qu’il avait eu pour metteurs en œuvre les membres de la plus immortelle de nos assemblées, que plus de 1 800 000 suffrages l’avaient déjà sanctionné en France, ce n’était pas dans l’intention de ravir une part de mérite quelconque à ceux qui ont soutenu cette thèse, après nous ou presque en même temps que nous. Il ne peut y avoir, là, question ni d’amour-propre ni de priorité. Nous n’avons eu qu’un but : aplanir l’obstacle que rencontre tout progrès dans une société vieillie, sceptique, rebelle à l’innovation, en montrant que le principe du gouvernement direct du Peuple était non seulement, dans la tradition française, mais qu’il avait eu la puissance de s’élever, un jour, jusqu’à la majesté d’une loi d’Etat. On a beau dire, et nous y insistons à dessein, c’est quelque chose, pour, les esprits timides, que de leur montrer ce principe de l’avenir ayant eu pour pères des esprits tels que Montesquieu, tels que Rousseau, la Convention pour organe, et inauguré, il y a 60 ans, par 1 801 918 suffrages contre 11 610. Pouvoir placer une idée sous un semblable patronage, n’est-ce pas avoir déjà fait la moitié de la besogne !

Mais, dit-on, si cette constitution était si merveilleuse, si praticable, pourquoi n’a-t-elle pas duré?

Est-ce donc, répondrons-nous, la seule vérité de notre grande Révolution qui ait été momentanément éclipsée? Et ceux qui parlent ainsi ont-ils bien réfléchi aux entraves qu’a briser en ce monde l’idée même la plus simple et la plus féconde ? Ne lui a-t-il pas fallu livrer vingt assauts, avant de pénétrer au cœur de la place? Si l’on devait mesurer le droit au succès, ne faudrait-il pas soutenir que l’esclavage, qui a duré des siècles et des siècles, est toujours légitime, puisqu’après avoir été aboli par la Convention, il a été rétabli par le Consulat, et que, demain, une assemblée de barbares se rencontrerait peut-être pour le rétablir encore ? L’histoire n’est-elle pas pleine de ces retours du passé, et ne sait-on pas que si, les révolutions qui fauchent, en courant, les plantes parasites et les vieilles ronces, n’en extirpent pas radicalement les racines, il sortira, demain, des mœurs, des préjugés, des intérêts, d’abondants rejetons sous lesquels sera étouffée, la semence nouvelle? Non, vraiment, l’objection n’est pas sérieuse.

Revenons, maintenant, aux principes que nous avions formulés, comme fondamentaux et inhérents à la nature même des sociétés.

Nous avions dit :

1° La souveraineté, n’étant que l’exercice de la volonté générale, ne peut jamais s’aliéner : – de là, l’institution de République – car, toute autre forme de gouvernement serait une aliénation du droit.

2° Le souverain, qui n’est qu’un être collectif, ne peut être représenté que par lui-même : – de là, le gouvernement direct du Peuple.

Quant au premier principe, il est le symbole de l’école démocratique révolutionnaire ; il la distingue de toutes les autres écoles.

Nous ne sommes point, en effet, de ceux qui placent la volonté d’une nation au-dessus de certains droits préexistants, de certaines libertés natives et primordiales, que rien ne saurait entamer. Dire d’un peuple, qu’il est maître de se donner toutes les lois qu’il veut, et que, s’il lui plait de se faire mal à lui-même, personne n’a le droit de l’en empêcher, c’est méconnaître le principe sur lequel reposent les sociétés, qui est le bien-être commun et la garantie de la liberté de chacun par la force et la volonté de tous.

La société n’est pas seulement un fait, une agglomération fortuite, le produit du hasard ; elle est basée sur un contrat tacite, par lequel les hommes ont fait l’échange d’une manière d’être incertaine et précaire contre une autre, meilleure et plus sûre, de l’indépendance naturelle contre la liberté civile, de leurs forces, que d’autres pourraient surmonter, contre un droit que l’union sociale rend invincible. Or, cette liberté n’est rien moins que la liberté de conscience et de culte, la liberté de penser publiquement, la liberté de se réunir, le droit de vivre en travaillant, de conserver la propriété née de ce travail, le droit de voter le pacte social et la loi qui oblige, droits au-dessus desquels ne se peut placer aucun souverain absolu ; Peuple ou roi, contre lesquels rien ne saurait prévaloir, ni volonté collective, ni dictature d’un seul ou de plusieurs, car ils sont pour chaque homme sa dot inaliénable en ce monde, sa part elle-même de souveraineté. Toute usurpation de ces droits serait un crime de lèse humanité, et le Peuple entier, moins un, fût-il complice, il y aurait attentat à la loi sociale, au principe, au dogme de la souveraineté, car il y aurait un esclave ou bien un martyr.

Rousseau l’a dit : « le corps politique ou le souverain, ne tirant son être que de la sainteté du contrat, ne peut jamais, à peine de le rompre, aliéner quelque portion de lui-même, ou se soumettre à un autre souverain. Violer l’acte par lequel il existe, serait s’anéantir; et ce qui n’est rien ne produit rien. »

Il a dit encore : « il ne dépend d’aucune volonté de consentir à rien de contraire au bien de l’être qui veut. Si donc le Peuple promet simplement d’obéir, il se dissout par cet acte, il perd sa qualité de Peuple ; à l’instant qu’il y a un maître, il n’y a plus de souverain, et, dès lors, le corps politique est détruit. »

Ces lois antérieures et supérieures au droit positif, la Constitution de 1848 les a reconnues. La France, à cette époque, s’est constituée non seulement en République démocratique, elle a déclaré que cette forme de gouvernement était, pour elle, définitive.

Que peut donc être une révision de la Constitution, en présence des principes éternels et des principes écrits que nous venons de rappeler, si ce n’est une simple réglementation, une organisation détaillée de la République démocratique?

Changer la forme, ce serait aliéner le droit, déchirer non seulement le pacte écrit de 1848, mais rompre le pacte tacite qui est la garantie de la liberté de tous, ce serait rendre à chacun sa liberté naturelle, le droit de la force et de la révolte.

Les journaux contre-révolutionnaires, qui croient, à l’aide de la révision, pouvoir rétablir la servitude, c’est-à-dire la monarchie, sont donc en dehors des principes constitutifs des sociétés ; sous prétexte de civilisation, ils nous ramènent à l’état sauvage, au droit à l’insurrection ; sous prétexte d’ordre, ils nous mettent un fusil à la main.

Ce n’est pas nous qui parlons ainsi, c’est Rousseau : « L’autorité suprême, dit-il, ne peut pas plus se modifier que s’aliéner ; la limiter, c’est la détruire. Il est absurde et contradictoire que le souverain se donne un supérieur ; s’obliger d’obéir à un maître, c’est se remettre en pleine liberté. »

La seconde règle que nous avions posée avec les illustres penseurs du XVIIIe siècle, avec la Convention, avec l’héroïque population qui nous délivra des tyrans et chassa l’étranger du territoire, c’est que la souveraineté, n’étant que l’exercice de la volonté générale, ne peut jamais se déléguer, et que le souverain, qui n’est qu’un être collectif, ne peut être représenté que par lui-même.

Inutile d’appuyer sur une doctrine irrévocablement fixée par ces deux passages du Contrat social : « Les députés du Peuple ne sont et ne peuvent être ses représentants ; ils ne sont que ses commissaires ; ils ne peuvent rien conclure définitivement. Le Peuple même ne peut, quand il le voudrait, se dépouiller de son droit incommunicable de voter les lois, parce que, selon le pacte fondamental, il n’y a que la volonté générale qui oblige les particuliers, et qu’on ne peut jamais s’assurer qu’une volonté particulière est conforme à la volonté générale, qu’après l’avoir soumise aux suffrages libres du Peuple. »

Maintenant, que tous les essais de représentation aient fait leur temps ; que le gouvernement direct du Peuple soit praticable ; qu’il n’y ait, pour le pays, de bonheur possible qu’à cette condition, que ce gouvernement, coupe court à toute révolution, qu’il n’amène ni anarchie, ni fédéralisme, ce sont autant de questions que nous avons précédemment traitées, et sur lesquelles nous allons revenir rapidement.

Comment soutiendrait-on, par exemple, que les divers systèmes de représentation ne sont pas jugés, lorsque, depuis les décemvirs romains jusqu’à la législature actuelle, l’histoire des représentants n’est qu’une longue série d’empiètements sur les droits des représentés ? Vingt siècles d’usurpation ne doivent-ils pas suffire pour décider d’une institution qui a permis, hier, à une assemblée de mandataires de rayer, d’un trait de plume, quatre millions de leurs mandants? L’énormité n’est-elle pas assez frappante?

Quant à la facilité pratique du gouvernement direct du Peuple, comment la prouver autrement que par la pratique même? Tout le reste n’est que déclamations, et les déclamations auxquelles on se livre contre lui, ne les a-t-on pas faites contre le suffrage universel, et avec quel déchaînement? Cependant, les conditions d’ordre absolu, et l’admirable régularité avec lesquelles a fonctionné cette grande institution doivent être notre éternel argument. Jadis, à Rome, quatre cent mille citoyens se réunissaient plusieurs fois par semaine sur une place publique, non seulement, pour légiférer— ce que nous demandons, — mais encore pour juger, pour administrer — chose à la fois mauvaise et superflue. — Comment donc la France ne pourrait-elle pas se réunir, quelques fois par an, pour voter ses lois, aujourd’hui qu’avec la presse, l’électricité, la vapeur, le pays n’est plus, comme on l’a dit, qu’un vaste forum ?

Oui, nous croyons encore que le Peuple ne constituera sérieusement son bonheur qu’à la condition de le voter lui-même. « Romains, disait le sénat au Peuple, après l’expulsion des Tarquins, rien de ce que nous vous proposons ne peut passer en lois sans votre consentement : soyez vous-mêmes les auteurs des lois qui doivent faire votre félicité. » Ce mot, il faut le faire pénétrer dans les masses, car, c’est dans les masses, dans la collectivité, qu’est le remède, ou il n’est nulle part. Qu’a-t-il manqué, en effet, jusqu’ici aux gouvernements révolutionnaires les mieux intentionnés? La mesure exacte, l’instinct vrai des souffrances du pays, la science nécessaire pour les guérir, l’unité de vues et la force morale suffisantes pour l’oser. Eh bien! qui sait mieux ses souffrances que celui qui a souffert? Qui mieux que la chaumière a senti les étreintes cruelles de l’usure et de l’impôt? Qui mieux que le soldat de l’industrie, les privations inouïes enfantées par la pression du capital et de la concurrence? Qui mieux que le fermier, le poids de la rente et la brièveté du bail ? Qui mieux que le propriétaire, le chancre de l’hypothèque? Et vous croyez que toutes ces douleurs n’auront pas songé au remède? Leurs angoisses sont plus fécondes que vos spéculations de cabinet. Vous imaginez, rêveurs présomptueux, que de ces comices en permanence ne sortira pas quelques intelligences d’élite, obscures, inconnues, quelques voix auxquelles le hasard n’aurait point ouvert les portes de vos étroites assemblées! Ah! c’est calomnier le Peuple, méconnaître la puissance de la collectivité. Le bon sens ou le génie n’est pas apparemment placé en dehors de la nation ; il sort de ses couches profondes. De quoi s’agit-il donc? D’aller a lui timide, caché, de délier toutes les lèvres, de ne pas laisser une note muette ici-bas. Tous finiront par trouver ce que n’ont pas trouvé quelques-uns, et une fois le remède connu, quelle force, pour l’appliquer, aura jamais été plus irrésistible que la force du pays lui-même ?

Quel autre préservatif encore que le gouvernement direct du Peuple, contre les déchirements et les guerres civiles, au milieu des écoles, des systèmes dont nous sommes assaillis? La secte est, de sa nature, intolérante, inflexible, sans quartier, par cela seul qu’elle croit tenir la vérité. Elle est d’autant moins disposée à transiger, que sa foi est plus ardente. Le cours de la Révolution pourrait être entravé par suite de l’effroi qu’elle inspire, tandis qu’en présence de la souveraineté vivante de tout un peuple, sa dictature n’est plus à craindre. Elle devra prendre la peine de convaincre la majorité du pays, pour lui imposer sa volonté. Quant au Peuple, il saura bien se défier de ceux qui se défient de son intelligence, qui veulent substituer leur science à la sienne, leur despotisme à sa liberté.

Pas plus de désordre que de tyrannie, voilà le sentiment universel du pays. Aussi comprenons-nous difficilement ce soupçon d’anarchie lancé contre la nation en corps. Les partis qui se croient, ou se disent la nation, peuvent espérer, du désordre, leur avènement au pouvoir ; mais, quand c’est la nation entière qui a le droit de parler, elle qui ne peut attendre son bonheur que du travail, quel intérêt lui supposer pour entretenir les troubles et les discordes? Pourquoi la paix ne régnerait-elle pas au sein de ces assemblées électorales, appelées à exercer leur droit d’initiative, à statuer, après discussion, par oui ou par non sur des lois préparées, aussi bien qu’elle règne dans les assemblées électorales convoquées pour élire un président ou des représentants? Dans ces comices constitués d’après le pacte de 93, pas d’intrus possible ; chacun se connaît. Ah! sans doute, nous ne croyons pas plus que d’autres à la perfection de l’homme, après vingt siècles d’esclavage ; mais si quelque chose peut déconcerter les mauvais instincts, transformer en nobles résolutions des passions secrètement détestables, c’est la lumière, la publicité, le nombre.

Entend-on encore, par anarchie, qu’il n’y aura, dans la politique de l’Etat, ni suite, ni cohérence? Nous répondrons, avec l’histoire, que les républiques ont toujours été à leurs fins par des vues plus constantes et plus suivies que tout autre gouvernement. Si les individus n’ont pour but que leur intérêt privé, la majorité n’a en vue que l’intérêt général, et la France serait, au besoin, la preuve de l’esprit de persévérance d’un peuple. Comment ne serait-on pas frappé de la constance de ses efforts, depuis 60 ans, pour conquérir une liberté définitive que les partis du passé, revenant à la charge, lui ont cinq fois ravie?

Avec le gouvernement direct du Peuple, dit-on, enfin, si ce n’est pas l’anarchie dans la pratique des affaires qui est à redouter, n’est-ce pas le fédéralisme dans le résultat? Etrange objection, vraiment ! Quoi ! la Convention, cette puissance de concentration par excellence, la Convention qui envoyait, en juin, les Girondins à l’échafaud, pour crime de fédéralisme, aurait, en août, donné au pays une constitution fédéraliste! Les meilleurs patriotes de cette assemblée, Robespierre, Saint Just, en tête, n’auraient été que des traîtres ou des sots! D’autre part, la raison ne dit-elle pas que si, quand la majorité du pays aura prononcé, une fraction quelconque se levait pour protester violemment — ce que nous ne voulons pas croire, car la vérité, proclamée par la presqu’unanimité d’un peuple, a son irrésistible évidence eh bien! jamais pouvoir central n’aurait été armé, pour la répression, d’une plus formidable puissance que le gouvernement direct du Peuple ? Ce serait le pays fait soldat. Il y aurait, entre ce gouvernement et ceux qui l’ont précédé, la différence de l’armée soldée, indécise, hésitante, à la trombe impétueuse de la levée en masse.

En résumé, la forme de gouvernement que nous proposons est celle-ci :

Le Peuple exerçant sa souveraineté, sans entraves, dans les assemblées électorales, telles que la police en a été réglée par la Constitution de 1795 ;

Ayant, dans les termes de cette même Constitution, l’initiative de toute loi qu’il juge utile ;

Votant expressément les lois, c’est-à-dire, adoptant ou rejetant, par oui ou par non, les lois discutées et préparées par son assemblée de délégués.

Une assemblée de délégués ou commissaires, nommés annuellement, préparant les lois, et pourvoyant, par des décrets, aux choses secondaires et de grande administration.

Un président du pouvoir exécutif, chargé de pourvoir a l’application de la loi et des décrets, de choisir les agents ministériels, président élu et révocable par la majorité de l’Assemblée.

Des esprits moins préoccupés de la réalité des faits, que des rigueurs apparentes de la logique, ont voulu davantage encore. Si diminuée qu’elle fut, une assemblée leur a porté ombrage ; ils soutiennent que le Peuple doit être à la fois législateur, administrateur et juge.

Délégués ou représentants, disent-ils, le mot seul est changé, le mal n’en subsiste pas moins. Cette réunion d’hommes pourra encore confisquer les droits du Peuple. Sous prétexte de rendre des décrets, ne voteront ils pas des lois ?

Nous croyions leur avoir répondu par ce mot de Hérault de Séchelles : « le possible a ses limites ; ce n’est pas assez de servir le Peuple, il ne faut jamais le tromper. » En fait, vouloir que le Peuple légifère, administre et juge, est-ce vouloir une chose possible, une chose praticable? Nous en appelons à tout homme sensé. Nous allons plus loin, nous soutenons qu’en principe, il y aurait oppression et chaos dans tout Etat où le Peuple garderait l’administration des affaires particulières et l’exécution de ses propres lois.

Il nous faut encore citer Rousseau, qui l’a dit avec raison dans vingt passages différents: « La loi n’étant que la déclaration de la volonté générale, il est clair que, dans la puissance législative, le Peuple ne peut pas être représenté ; mais, il peut et doit l’être dans la puissance exécutive, qui n’est que la force appliquée à la loi. L’objet de la loi est facile à définir, il est toujours général ; la loi considère les sujets en corps, et les actions comme abstraites, jamais un homme comme individu, ni une action particulière. ».

Il ajoute : « S’il était possible que le souverain eût la puissance exécutive, le droit et le fait seraient tellement confondus, qu’on ne saurait plus ce qui est loi et ce qui ne l’est pas, et le corps politique, ainsi dénaturé, serait bientôt en proie à la violence contre laquelle il fut institué. »

Nous nous croyons donc en droit d’insister sur la distinction si justement posée, par la Constitution de 1793, entre la loi et les décrets. Quoi qu’on en dise, la ligne de démarcation est facile à garder.

Comment, au surplus, pourrait être redoutable une assemblée nommée pour une année seulement, et contre laquelle le Peuple, dans ses comices toujours ouverts, a perpétuellement le droit d’initiative? Comment serait-elle redoutable, quand elle n’a plus ni le vote du contingent de l’armée, ni celui de l’impôt? Ne présente-t-elle pas, au contraire, l’avantage de rappeler sans cesse, par sa concentration, l’unité et l’indivisibilité de la République ; plus rapprochée du pouvoir exécutif, n’en sera-t-elle pas aussi le meilleur surveillant?

Quant au pouvoir exécutif, s’il doit être, à nos yeux, nommé, non par le Peuple directement, mais par l’assemblée des délégués, voici nos raisons :

Que faut-il au pouvoir exécutif ? L’instantanéité d’action, pour exécuter rapidement les volontés du Peuple.

Comment l’obtenir? Par l’unité.

– Or, vouloir, avec Condorcet, que le Peuple nomme directement ses ministres, c’est la confusion, car le Peuple ne choisira pas ceux qui ont le même plan, les mêmes idées, le même système, mais ceux-là, au contraire, qui justement à cause de leurs systèmes différents, auront acquis le plus de renommée.

Vouloir, avec la Constitution de 95, que chacun des 86 départements élise un candidat, et que, parmi les 86 élus, 24 membres du pouvoir exécutif soient choisis par l’Assemblée, c’est trop éparpiller le pouvoir, pour qu’il agisse efficacement.

Demander, enfin, comme on l’a fait récemment, qu’un ministre du Peuple soit élu par la nation entière, c’est donner trop d’importance à un homme, c’est rappeler la présidence, et préparer de nouveaux éléments de lutte et d’antagonisme. Soumettre ce ministre du Peuple au contrôle permanent d’un conseil composé de toutes les minorités rivales, c’est tuer, à l’avance, son action, car, ces différente minorités réunies contre lui représenteront la majorité du pays. Ne sera-ce pas ce dictateur à qui l’on proposait de mettre un boulet au pied ?

Peu importe, d’ailleurs, l’organisation de détails? La Constitution de 95 l’avait réglée en 87 articles. On peut les réduire encore. On sera bientôt d’accord à cet égard, du moment qu’on le sera sur ce peu de principes, qui contiennent, selon nous, le salut de la République, et que nous prenons la liberté de recommander à toute la sollicitude, aux plus incessantes méditations de tous les patriotes et de la presse des départements en particulier :

Permanence de la souveraineté du Peuple dans ses assemblées électorales.

Droit d’initiative.

Droit exclusif de voter les lois.

Election annuelle des assemblées des délégués et de tous les mandataires du Peuple.

Révocabilité constante du pouvoir exécutif par l’assemblée des délégués.

Que ces principes volent de bouche en bouche, qu’ils se répètent à l’oreille, qu’ils pénètrent dans l’atelier, dans la mansarde, dans la chaumière. Si les royalistes, par leurs violences, paraissent suffire à l’œuvre de la Révolution, c’est au Peuple lui-même de consolider l’avenir, en le préparant.

Cet avenir peut être demain, car le pouvoir aux prises avec l’idée, vivant, comme tous les vieux pouvoirs, non de la vie du Peuple, mais de résistance, d’expédients, de subterfuges, nous rappelle ce tableau d’un de nos maîtres, où l’on voit la dernière famille humaine luttant contre l’envahissement du déluge ; elle a gravi de rocher en rocher, de cime en cime.

Efforts superflus ! L’eau monte toujours, et si les malheureux n’ont pas encore disparu dans l’abîme qui les environne de toutes parts, le spectateur sent qu’il y seront bientôt engloutis.

Plaidoyer pour l’Autogouvernement

Est-il possible de formuler positivement l’idée de Démocratie Directe ou doit-on se cantonner à une critique de la Démocratie Représentative ? A défaut de pouvoir dire à coup sûr « comment » mettre en oeuvre un Autogouvernement, peut-on au moins dire « pourquoi » une telle forme démocratique est souhaitable ?

Une apparence de démocratie, une réalité oligarchique

Nous vivons dans une démocratie représentative qu’il serait plus juste d’appeler délégataire dans laquelle le mandat impératif est interdit par la Constitution[1]. Nous nous contentons donc de glisser un bulletin de vote dans l’urne. Avec ce chèque en blanc, nos élus décident de tout mais ne rendent aucun compte. Cette vision claire de ce qu’est la démocratie représentative n’avait d’ailleurs par échappé aux pères fondateurs des révolutions américaines ou françaises qui y voyaient un moyen pour l’élite d’exercer en fait, au nom du peuple, le pouvoir qu’elle est obligée de lui reconnaître mais que le peuple ne saurait exercer sans ruiner le principe même du gouvernement[2].

Nous vivons donc dans une apparence de démocratie. « L’idée selon laquelle nous ne sommes pas en démocratie n’implique pas que nous serions en régime totalitaire, dictatorial, ou tyrannique – cela signifie simplement qu’il faut refuser de nous laisser enfermer dans l’alternative démocratie ou totalitarisme et qu’il faut donc mobiliser un troisième concept (intermédiaire) qui permet de caractériser nos régimes politiques comme étant  oligarchiques. »[3]

Un président élu après avoir été choisi au premier tour par seulement 18,19% des électeurs inscrits peut-il être le président de tous les Français ? Un taux d’abstention dépassant dans beaucoup de scrutins 50% des inscrits, fait-il de nos élus des représentants légitimes ou seulement légaux ? L’Assemblée nationale composée de 70% de cadres (18% dans la population française), le Sénat de 28% de femmes sont-ils réellement des organes démocratiques ?

La racine du pouvoir des oligarques est leur prétention à être plus compétents que le peuple alors que la démocratie repose sur le fait que nous sommes égaux en capacité de jugement face aux enjeux majeurs. Cette professionnalisation des élus les conduit à prendre des décisions court-terme. Les solutions qui privilégient le long terme (environnement, souveraineté alimentaire, etc.) sont de peu de poids face à leurs préoccupations personnelles de plaire à leurs électeurs pour leur future réélection.

Dénis de démocratie

Souvenons-nous du Traité Constitutionnel Européen adopté sous une autre forme par le Parlement français à plus de 75 % en 2008, alors qu’il avait été rejeté par 56 % des français·es par référendum en 2005.

Gardons en mémoire les négociations secrètes, dont même les parlementaires furent exclus, menées par la commission européenne sur le TAFTA et le CETA sur la base d’arguments fallacieux.

Enfin, songeons qu’en France, deuxième producteur d’électricité nucléaire au monde, aucune consultation citoyenne n’a jamais été menée sur le sujet. Nous connaissons pourtant tous les conséquences dramatiques d’un accident sur la vie de millions de citoyens · nes pendant des centaines d’années.

Des mécanismes de Démocratie Directe existent, tel le Référendum d’Initiative Partagée (adopté en 2008), mais les 4,7 millions de signatures, le délai des près d’une année, la double validation du Conseil Constitutionnel qui sont nécessaires à sa mise en oeuvre, le rendent totalement inopérant dans les faits. De toute façon, le référendum peut être considéré comme un leurre démocratique. C’est l’art de répondre par oui ou par non à une autre question que la question généralement mal posée, une question qui pourrait mériter une autre réponse que ce manichéisme, réponse qui pourrait être amendée. Le peuple doit dire oui ou non puis se taire. Le « oui » plébiscite souvent celui qui a posé la question. Le « non » peut aussi ne pas répondre à la question mais viser à se débarrasser du questionneur, comme cela a été le cas pour Charles de Gaulle en 1969[4].

En définitive, Hervé Kempf porte un constat lucide sur les illusions politique des pays occidentaux : la première consiste à se croire en démocratie quand on glisse vers le régime oligarchique, la seconde est de considérer l’économie comme l’objet presque exclusif de la politique. [5]

Des évolutions sont-elles la solution ?

Les solutions habituellement invoquées pour revigorer nos démocraties oligarchiques[6] semblent toutes frappées au coin de l’illusion, voire de la naïveté : plus de participation citoyenne (pour mémoire le budget participatif parisien représente 5% de l’enveloppe globale, et encore des doutes existent quant à la réalité du dispositif), tirage aux sort d’une partie du parlement, suffrage proportionnel, non-cumul des mandats, réécriture participative de la Constitution (voir cet article sur la Constitution), consultations / co-production citoyennes en tous genres (DemocracyOS) et toute une flopée d’autres demi-mesures molles.

L’Autogouvernement comme seul moyen pour l’homme d’être libre et digne

Le texte qui suit, est issu de fragments recomposés, remaniés et purgées de ses références par trop datées, d’un ouvrage de Victor Considerant : La solution ou Le gouvernement direct du peuple, paru en 1851. Formidable propagandiste de ce qui ne s’appelait pas encore la Démocratie Directe, ce disciple de Charles Fourrier s’avéra, paradoxalement,  un exécrable maître d’oeuvre du concept d’Autogouvernement (voir l’échec cuisant de la colonie de La Réunion au Texas)[7].

Laissons en tous cas parler la plume de ce grand utopiste, dont les écrits continuent d’illuminer, plus de 150 ans ans après leur parution, l’horizon politique d’un XXIème siècle assombri.

De la naissance de la civilisation et de sa trajectoire inéluctable vers la Démocratie Directe

Au début de tout, l’humanité n’existe encore que dans ses éléments rudimentaires. Ils sont dissidents avec eux-mêmes. Divisées, les tribus ou les hordes se font la guerre. Les Etats se forment. Le travailleur, protégé par le glaive du guerrier a bientôt trouvé en celui-ci son maître. L’hérédité incarne dans des castes les usurpations de la force. L’aristocratie et la monarchie grandissent, tandis que l’intelligence ambitieuse, se saisissant de la notion de Dieu, lui a prêté des formes redoutables, une puissance mystérieuse et terrible dont elle s’est constituée ministre. C’est la théocratie. Elle luttera avec l’aristocratie et la monarchie quand elle se croira de force à les dominer ou bien elle se liguera avec elles pour partager les profits d’une exploitation commune. La Force et l’Astuce sont régulièrement substituées au Droit, au gouvernement primitif, à la Volonté Collective.

Entre temps les Industrie des nations se développent, la science surgit ; l’Industrie et le Travail deviennent des puissances, la notion du droit naturel se fait jour dans les masses ; et, à mesure qu’elles s’éclairent, celles-ci sentent mieux le joug. La Justice, la Liberté, le Droit suscitent des poètes qui les chantent, des philosophes qui les prouvent, des verbes qui les propagent, des martyrs qui les sanctifient. Le sentiment démocratique grandit, combat, triomphe: Il s’est formulé par la négation des autorités de race et de droit divin, des aristocraties, des monarchies, des théocraties. Il a proclamé son principe : Le gouvernement du Peuple par lui-même.

Ainsi, autrefois, l’intelligence du Peuple n’était pas éveillée, ne fonctionnait pas. Le Peuple n’avait que des besoins. Il était comme l’animal, et le gouvernement, son maître, était chargé de pourvoir à ses besoins et de penser pour lui. Investi maintenant de son autonomie, le Peuple devient Etre intelligent, libre, responsable. Il se charge de lui-même. Il voit les difficultés face à face, et s’il ne les peut résoudre eu un clin d’oeil, il ne saurait plus du moins s’en prendre à personne.

Quand la pyramide politique repose sur la nation, elle est carrément assise sur sa base et non plus en équilibre artificiellement sur sa pointe. La stabilité est garantie. Premier point capital.

Le Peuple ayant à résoudre lui-même la question qu’il pose, ne peut plus exiger d’autrui une solution immédiate, impossible dans l’état des idées et des choses par la contradiction même de ces idées et de ces choses. Deuxième point capital.

La démocratie c’est-à-dire le gouvernement universel du peuple par lui-même (et non l’oligarchie, l’aristocratie ou la monarchie) a pour elle, la force du droit et le nombre. Il suffit qu’elle cesse d’être divisée avec elle-même, qu’elle réalise sa propre union et le droit moderne est établi, le dogme passe en acte, la révolution politique est close, et l’humanité fait enfin elle-même sa destinée.

Un peuple libre donc autonome

Je vous le dis en vérité, ôtez-moi cette compétition du Pouvoir qui arme fatalement les idées et en fait des Partis; donnez-moi la liberté, que la souveraineté nationale réalise nécessairement, chacun la voulant pour soi-même : à ces deux conditions, je vous garantis la prompte solution de toute difficulté se posant à la société. Lorsque le problème est posé dans le Peuple vivant, les esprits travaillent, les idées s’élaborent par la discussion, s’incarnent dans de libres expériences. Et c’est ainsi que le progrès sérieux se fait dans l’humanité.

La liberté, c’est ce qui fait l’homme. L’esclave qui accepte sa condition d’esclave n’est pas un homme. Ce n’est encore qu’une bête de somme à deux pieds. L’homme n’est pas fait pour avoir un maître ou des maîtres. L’homme ne doit pas obéir. S’il pouvait y avoir des raisons essentielles pour que Pierre obéît à Paul, il y en aurait autant pour que Paul obéît à Pierre ; ou bien Paul et Pierre ne seraient pas de la même espèce. Et jusqu’ici les masses humaines, les peuples, ont eu des maîtres ; rois, empereurs, législateurs, représentants…, des maîtres, toujours des maîtres sous diverses dénominations et apparences. Les peuples ne seront libres que quand ils n’auront de maîtres sous aucune forme.

Ainsi, la Souveraineté c’est la liberté, la liberté pleine, la liberté à chaque instant, la liberté toujours. Est-ce que la volonté de ceux d’aujourd’hui est enchainée par la volonté des électeurs d’hier, de l’année dernière, du siècle dernier? Où est le droit des morts sur les vivants? Qui a le droit, d’ailleurs d’interdire à la nation d’avoir aujourd’hui d’autres opinions, d’autres préjugés, d’autres caprices, si vous voulez, qu’hier? Voyons ! Qu’on me montre donc quelque part un droit primant la volonté actuelle, toujours actuelle de la nation!

Libre, la Nation est responsable. Aussi, une mauvaise loi, sortie de la volonté nationale, vaut-elle mieux qu’une bonne loi décrétée par un gouvernement extérieur à cette volonté, contre cette volonté. Car la Nation voyant sa loi en oeuvre, la juge, la rappelle et la corrige.

Ce n’est pas dans l’esclavage que l’esclave acquiert le don de se servir dignement de la liberté. Pour qu’il apprenne à se servir dignement de sa liberté, il faut d’abord qu’on la lui donne… ou qu’il la prenne.

Ainsi, un peuple que l’on gouverne reste stérile pendant des siècles. Un peuple qui se gouverne fera en peu d’années l’éducation de sa liberté et de son intelligence.

La Souveraineté du Peuple, cela signifie la volonté libre, absolument libre, absolument indépendante, l’autonomie, l’autocratie du Peuple, le Peuple n’obéissant qu’à lui-même, autrement dit, n’obéissant pas, faisant sa propre volonté.

Tromperies de la Démocratie Représentative

L’escroquerie de la Souveraineté du Peuple s’appelle la DELEGATION. Il faut toujours, pour satisfaire les hommes de pouvoir, que la Souveraineté du Peuple se suicide par DELEGATION en faveur de l’objet de leur choix. C’est à cette condition qu’ils consentent à la reconnaître.

L’aliénation de sa liberté par le peuple, fût-elle faite en bonne forme, est nulle de plein droit. La DELEGATION est une impudente moquerie, un attentat honteux et déguisé sur la Souveraineté du Peuple, c’est-à-dire sa négation plus une hypocrisie.

La Souveraineté qui se soumet à quoi que ce soit d’extérieur à elle-même, c’est contradictoire, c’est comme un cercle carré, une sphère pyramidale. Si le Peuple délègue sa Souveraineté, il l’ABDDIQUE. La démocratie ne peut donc vouloir de la DÉLÉGATION sous aucune forme. Ce serait vouloir en même temps deux contraires.

De même, si le Peuple peut DÉLÉGUER sa Souveraineté, l’exercice de sa Souveraineté (en fait, c’est tout un), c’est-à-dire l’abdiquer pour un an, pour deux ans, pour trois ans, pourquoi pas pour dix, pourquoi pas pour un avenir indéfini ? Et je vais vous dire tout de suite une chose : c’est qu’un Peuple qui tient sa souveraineté et qui l’abdique, ne fût-ce que pour un an, est pris. On lui fait bien vite une Constitution, des lois de circonstances, des organes légaux de sa Souveraineté, c’est-à-dire des chaînes et des gens pour les tenir. La Souveraineté réside dans l’universalité des citoyens et nulle fraction du Peuple ne peut, sans forfaiture, s’en attribuer l’exercice.

Ainsi, ceux qui ont en main la confection de la loi, la confection de la loi avec laquelle on rend légale à volonté la suppression de toutes les libertés publiques, avec laquelle on fait tout ce que l’on veut; qui disposent de la force armée; qui nomment à tous les emplois; qui décident souverainement de l’impôt, de la paix, de la guerre, de tout enfin… Ceux-là, certes, sont LE Souverain! Et je voudrais savoir ce que le plus absolu des despotes leur pourrait envier? Ils ont, outre le pouvoir absolu, arbitraire, despotique, un air de légalité et un manteau de droit national, qui semblent rendre leur pouvoir absolu sur le Peuple parfaitement raisonnable et légitime.

Avec l’élection, la Souveraineté s’exerce ce jour-là pendant le temps nécessaire pour faire tomber un morceau de papier dans une boîte. Cela fait, elle ira dormir jusqu’à ce qu’on vienne la réveiller, à moins, toutefois que, pendant son sommeil, on ne l’étrangle; mais ne prévoyons pas ce pénible accident. Le peuple donc, aux jours d’élection, marche aux boîtes électorales. Il y dépose son vote, et voilà sa Souveraineté dans des tirelires dont il n’a plus la clef. Le voilà remis sous le joug. Ce souverain dépend d’une volonté extérieure à la sienne. Les partis n’ont plus désormais qu’à faire jouer leurs influences. On leur a rendu leur forme, leur instrument. On a refait et remis au Peuple une bride. Il n’y a plus qu’à s’en saisir, c’est-à-dire à s’emparer de la majorité. C’est bientôt fait. Le dos du Peuple a retrouvé un cavalier éperonné et tenant cravache. Et marche Populus ! Marche donc, tu es souverain !

Le Peuple universel est le seul pouvoir, le seul Souverain, par conséquent le seul législateur universel. Il est temps d’en finir avec les Révolutions, c’est-à-dire avec les gouvernements d’usurpation, avec les dynasties, avec les partis. Cela ne se peut qu’en submergeant les partis dans la nation. La volonté collective du Peuple est la seule loi que le Peuple puisse tenir pour légitime et reconnaître. Et ce n’est pas comme gouvernement de révolution, mais comme membres du Peuple nous-mêmes, de notre propre droit d’hommes et de citoyens français que nous proclamons ces grands principes. Le Peuple universel est le législateur naturel du Peuple, chaque citoyen a le droit de n’en pas reconnaître d’autre. Tel est le dogme moderne du droit politique, l’esprit vivant de la société nouvelle.

C’est parce que c’est impossible que nous le feront

La Démocratie Directe, cela est beaucoup trop simple, beaucoup trop facile, pour ne pas paraître tout d’abord monstrueux, absurde, impossible et souverainement extravagant à tous les hommes d’Etat et à toutes les fortes têtes politiques. Moi-même, hélas! en ma qualité de tête pensante, n’en ai-je pas été scandalisé tout le premier, et n’ai-je pas répondu à la proposition par un sublime sourire, accompagné d’un fort significatif « laissez donc ! » Ces arguments vainqueurs, bien d’autres que moi les feront, et on ne s’en tiendra pas là.

Je pourrais me contenter de répondre que j’en suis désolé, mais que c’est une chose nécessaire. Et cette réponse suffirait. L’impossibilité, en effet, n’a jamais rien empêché. Qu’on me cite un progrès accompli, petit ou grand, qui n’ait, en son temps, été déclaré impossible par les hommes sages, c’est-à-dire par les Burgraves de l’époque. L’histoire des progrès de l’humanité n’est qu’un immense tissu d’impossibilités réalisées.

Et pourtant, le rôle législatif et gouvernemental paraît tellement chargé, qu’il est, j’en conviens, assez naturel de nier, au premier abord, que le Peuple s’en puisse tirer lui-même. Qu’il me soit permis de reproduire une observation déjà faite, c’est que la Souveraineté réelle du Peuple par cela même qu’elle termine la révolution politique moderne, supprime les neuf dixièmes des travaux où s’absorbent depuis toujours nos assemblées législatives.

Les neuf dixièmes du temps de ces assemblées étaient employés, en effet, en fabrication de lois réglementaires, compressives ou répressives, dont la compétition des partis et l’ébullition révolutionnaire fournissaient l’éternel sujet ou l’éternel prétexte. Tout cela disparaît. Ce travail de Danaïdes est clos par la proclamation pure et simple des libertés que les gouvernements extérieure à la nation lui ont disputées depuis tant d’années.

Sous ce rapport, la tâche est donc singulièrement simplifiée. J’ai montré d’ailleurs que la spontanéité des individus, des opinions des écoles, se chargerait naturellement et nécessairement, en dehors de la voie législative, par le fait même de l’avènement de la liberté, de la plus grande partit du travail de la réforme sociale proprement dite. Tout le travail se fera, non pas en un jour sans doute, mais cela se fera promptement, beaucoup plus promptement par le Peuple universel que par nos assemblées législatives. Pourquoi? Pour une raison bien simple. Parce que nos assemblées discutant phrase par phrase, mot par mot, les libellés des lois, ces discussions et les combats des amendements et sous-amendements, qui se livrent sur le champ parlementaire où les principes contradictoires se disputent pied à pied le terrain, renaissant sans cesse sous toutes les formes imaginables, promènent dans des méandres infinis la confection des lois et n’en font sortir, très lentement, que des textes confus, compliqués, équivoques, souvent contradictoires et généralement détestables. D’où suit que quand un travail est censé fini, c’est bientôt un travail à recommencer tels ces écureuils dans leur roue.

La seule organisation possible d’un peuple majeur

Le Peuple est majeur. Blancs, bleus ou rouges, il ne souffrira plus de tuteurs. Voilà ce qu’il faut comprendre et ce dont tous les démocrates doivent se réjouir. Quand les masses étaient indifférentes, passives, inertes, elles étaient gouvernables par en haut. C’était le beau temps des monarchies, des théocraties, des aristocraties. Quand les masses pensent, quand elles sont devenues actives, spontanées, quand elles ont des opinions, des volontés, des passions, elles sont alors des forces vives, libres, autonomes, elles ne peuvent plus se subordonner, obéir, dépendre. C’est leur avènement. La loi dès lors ne peut plus être autre chose que l’expression même de leur pensée, de leur intérêt, de leur volonté collective. Or, ceci, c’est précisément la DÉMOCRATIE. Une fois l’évolution politique accomplie par la réalisation pleine, absolue, du droit démocratique ; l’immense et formidable question révolutionnaire du pouvoir vidée ; les haines intestines, les luttes furieuses, les inextricables difficultés, les complications de tout genre qui lui sont propres taries dans leur source ; alors, la Liberté, la Spontanéité de l’Esprit humain parviendront, en même temps que la Souveraineté du Peuple, à leur glorieux avènement.


[1] Démocratie ? idées reçues et proposition. Editions Utopia. 2018.  
[2] La haine de la démocratie par J. Rancière Editions La Fabrique 2005.
[3] Manuel Cervera-Marzal
[4] Démocratie ? idées reçues et proposition. Editions Utopia. 2018.
[5] Hervé Kempf
[6] prônées notamment par le mouvement Utopia, à l’origine de la publication déjà citée « Démocratie ? idées reçues et proposition ». Ainsi, toute la première partie de cet ouvrage résume bien ce que l’on sait sur les maux de la démocratie représentative. Les solutions proposées dans la 2ème partie en revanche font assaut de tiédeur.
[7] Une nouvelle leçon à méditer sur ce que l’on peut attendre d’un leader charismatique...

Une loi fondamentale est-elle fondamentalement inutile ?

Constitution piège à cons
N’est-il pas temps de renoncer à nos croyances en la nécessité d’une Constitution, drap pudique derrière lequel le droit serait à tout jamais respecté et chéri ? Une véritable démocratie, c’est-à-dire une démocratie directe, ne peut-elle faire l’économie d’une loi fondamentale ? Notre conception d’un gouvernement juste et équitable découlant d’une loi écrite n’est-elle pas uniquement le contre-pied de siècles d’un pouvoir monarchique absolu ?

Le Petit Larousse donne du terme « Constitution » la définition suivante. Ensemble de lois fondamentales qui (1) établissent la forme d’un gouvernement, (2) règlent les rapports entre gouvernants et gouvernés, et (3) déterminent l’organisation des pouvoirs.

Un gouvernement unique ou un pouvoir protéiforme ?

Cette définition présuppose donc dans sa première partie qu’il n’y aurait qu’une seule forme de gouvernement pour un territoire défini. Or, par définition l’Autogouvernement signifie que chaque citoyen, assemblé au niveau de sa commune constitue un gouvernement. Par exemple, au Chiapas, le pouvoir absolu est donné aux assemblées communales (voir cet article sur l’organisation du pouvoir zapatiste). Il existe donc une myriade d’assemblées fonctionnant toutes selon des modalités propres (même si des règles communes peuvent être trouvées).

Le pouvoir n’est pas extérieur au peuple

La 2è partie de la définition nous dit que la Constitution règle les rapports entre gouvernants et gouvernés, mais c’est bien le cœur même du principe de démocratie directe de ne pas dissocier le pouvoir et les citoyens. Rappelons que l’Autogouvernement repose d’abord sur le principe de non délégation de la souveraineté ou d’une délégation en « laisse courte » pourrait-on dire. Si une délégation est accordée, les conditions en sont scrupuleuses, le contrôle constant et la révocation à effet immédiat. Aucune muselière constitutionnelle n’est nécessaire. De simples lois suffisent là où en régime représentatif, la Constitution est là pour encadrer et limiter les abus d’un pouvoir indépendant.

Plasticité des organes de pouvoir

L’organisation d’un autogouvernement suppose à rebours de la fixité d’une Constitution, une évolution constante des modalités du pouvoir d’année en année. Là encore, l’exemple du Chiapas (voir cet article), démontre que le pouvoir change constamment dans le temps et dans l’espace sans recourir à de pesantes procédures.

Ainsi, la Constitution, ce Dieu distant et révéré, réclamant sa part de rites (réunion des 2 chambres à Versailles) ne serait le garant de la paix civile qu’en démocratie représentative. Dans une démocratie réelle, sans délégation de pouvoir, les citoyens n’ont pas besoin de se prémunir contre eux-mêmes. Ils sont donc libres de changer les règles qu’ils se donnent en vertu de simples lois.

Revenons maintenant sur l’histoire constitutionnelle de la France.

La France, un pays de Constitution fragile

Rappelons que la France a connue 15 Constitutions depuis 1789[1]. Le record de durée appartient à celle de la IIIe République (1875 – 1940) suivie par la dernière en titre proclamée en 1958. Le texte fondamental de la Vè République comprend 89 articles auxquels 28 autres ont été ajoutés depuis son entrée en vigueur, ainsi que tous les textes figurant en préambule (45 articles[2]), soit un total de 162 articles.

Une telle quantité de textes est-elle pour autant garante de notre liberté ? Non bien sûr, si on se rappelle la fin de la 3ème République et le vote à la majorité des 2 chambres donnant les pouvoirs constituants à Philippe Pétain. Non encore, si on pense à la torture perpétrée pendant la guerre d’Algérie sous la Vème République[3]. Aujourd’hui et pour ne prendre qu’un exemple, les principes constitutionnels sont quotidiennement foulés aux pieds, tel celui de l’article 5 de la Charte de l’environnement disposant du « principe de précaution »[4]. Cet article énonce en effet un principe inapplicable, le caractère incertain du dommage pressenti lui ôtant toute objectivité.

D’autres principes méritent citation tant ils sont emphatiques et dénués de tout caractère pratique : « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement » (article 2) ; « La présente Charte inspire l’action européenne et internationale de la France » (article 10). C’est beau comme du Céline Dion ! On trouve même dans cette Charte de l’Environnement à valeur constitutionnelle des contre-vérités : « Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social » (article 6). Il n’est pas besoin de préciser que le « développement durable » évoqué dans ce texte est un oxymore opposant deux notions incompatibles : la croissance économique infinie (dans un monde fini) et la diminution des atteintes à la nature.

Et la Grèce antique ?

Si la France serait un contre-exemple, qu’en est-il d’Athènes, première démocratie directe répertoriée dans l’histoire me direz-vous[5] ?

La cité antique a eu plusieurs Constitutions dont Aristote a rendu compte à grands traits dans un ouvrage célèbre balayant 300 ans de son histoire[6]. Alors, direz-vous, ces Constitutions ne sont-elles pas une objection majeure à la démocratie directe en tant qu’organisation non constitutionnelle ? Oui, les Constitutions existaient aux périodes démocratiques (de -507 à -322). Leurs révisions faisaient l’objet d’une procédure particulière (uniquement la première assemblée de l’ecclesia chaque année, etc.). Mais, La Constitution n’est pas tout et la pratique contribue pour une part importante à ce qu’est le régime politique de la Cité. Aristote nous dit d’ailleurs dans son célèbre ouvrage « Bien que la Constitution telle qu’elle est réglée par la loi n’ait rien de démocratique, cependant, par l’effet de la coutume et des habitudes de vie, elle est appliquée dans un esprit démocratique, et il en est de même, à leur tour, dans d’autres États où la Constitution légale étant plutôt démocratique, le genre de vie et les moeurs impriment aux institutions une tendance oligarchique ». Comme le dit Castoriadis (Ce qui fait la Grèce T1, p. 270) « La démocratie directe des Athéniens va de pair avec le refus de la représentation, de l’expertise politique, de l’illusion constitutionnelle ».

Une constitution qui nous colle à la peau

Que dire des mouvements contemporains qui visent à écrire directement, entre citoyens, une nouvelle Constitution ? Sur Internet, wikicratie.fr ou ateliersconstituants.org réclament ainsi une assemblée constituante tirée au sort qui aurait pour tâche la rédaction d’une nouvelle Constitution[7]. On le voit, dans ces réflexions comme dans celles autour du Référendum d’Initiative Citoyenne, en cherchant à redonner du pouvoir politique au citoyen, on fait appel au vieux réflexe historique réclamant une nouvelle Constitution (fut-elle élaborée de façon collaborative). Aux mêmes causes, les mêmes effets. Plutôt que par l’élaboration d’un nouveau texte, la vraie rupture populaire est à rechercher dans un autre ordre politique, le gouvernement des citoyens par eux-mêmes : l’Autogouvernement ou Démocratie directe intégrale.

Notons en passant que cet attachement viscéral à une loi fondamentale semble venir en grande partie de l’Esprit des Lumières, à la source duquel s’est abreuvée la Révolution française et dont se réclame la « science moderne ». Ce mouvement intellectuel qui place la spéculation intellectuelle au-dessus de l’expérience pratique, nous inculque qu’un raisonnement droit est préférable aux courbes d’une vérité en mouvement. La théorie de la Constitution répond bien à cette inclination pour le « culte de la raison ». Toutefois, maintenant que les régimes oppresseurs et les croyances contre lesquels ces penseurs du XVIIè siècle luttaient sont révolus, peut-être serait-il temps de nous affranchir de ce cadre de pensée rigide pour nous ouvrir à des conceptions plus souples et donc plus proches de nous en tant qu’êtres humains ?

Vive les grands principes

L’énonciation de grands principes (tel que « commander en obéissant » zapatiste) n’est certes pas préjudiciable. Le constitutionalisme qui veut régir contractuellement tous les problèmes présents et à venir peut poser problème et semble inutile pour un Autogouvernement constitué de citoyens. Il est également bon de rappeler que le Royaume Uni, en tant que démocratie représentative ne dispose pas d’une Constitution en tant que telle mais repose sur un ensemble non écrit d’us et coutumes.

Comme le dit en substance Castoriadis (Fait et à faire), le fétichisme d’une constitution parfaitement démocratique a parfois servi de masque aux plus sanglantes tyrannies. Mais si j’avais à m’exprimer devant une ecclesia sur l’opportunité d’une constitution, j’en serais certainement partisan, parce qu’un texte condensé affirmant solennellement certains principes et ne pouvant être modifié que moyennant des procédures spéciales et des majorités qualifiées, me semble utile à la fois pragmatiquement et, surtout, pédagogiquement.

Laissons toutefois le mot de la fin à Victor Considerant (1851) : « Vous n’avez plus à vous battre les flancs pour imaginer des Constitutions artificielles, ni à vous battre entre vous pour faire prévaloir celles qui vous plaisent respectivement. Il n’y a plus de constitution sur le papier, parce qu’il y a une constitution vivante. Elle s’appelle en France le Peuple français […]. L’exercice de la Souveraineté du Peuple par le Peuple supprime déjà toute Constitution du pouvoir politique, artificielle, écrite, conventionnelle, par la raison fort simple qu’il est la constitution naturelle de la Souveraineté[8]. »


[1] Constitution de 1791 - 3 et 4 septembre 1791
Constitution de l'An I - Première République - 24 juin 1793
Constitution de l'An III - Directoire - 5 fructidor An III - 22 août 1795
Constitution de l'An VIII - Consulat - 22 frimaire An VIII - 13 décembre 1799
Constitution de l'An XII - Empire - 28 floréal An XII - 18 mai 1804
Charte de 1814 - 1ère Restauration - 4 juin 1814  
Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire - Cent-jours - 22 avril 1815
Charte de 1830, monarchie de Juillet - 14 août 1830  
Constitution de 1848, IIe République - 4 novembre 1848 
Constitution de 1852, Second Empire - 14 janvier 1852 
Lois constitutionnelles de 1875, IIIe République - 24, 25 février et 16 juillet 1875 
Loi constitutionnelle du 2 nov. 1945 - Gouvernement provisoire  Constitution de 1946, IVe République - 27 octobre 1946 
Constitution de 1958, Ve République - 4 octobre 1958 
[2] Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 : 17 articles, Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : 18 articles, Charte de l'environnement de 2004 : 10 articles. La première Constitution de 1791 comprenait 202 articles : un progrès ! 
[3] contrevenant notamment à l’article 7 Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 « Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l'instant : il se rend coupable par la résistance »
[4] Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. 
[5] Rappelons toutefois, pour replacer la « démocratie » directe athénienne dans son contexte qu’elle ne concernait que 10% des citoyens (femmes et enfants, esclaves, métèques en étaient exclus) 
[6] Pour l’histoire allant de -600 et -300 environ dans l’ouvrage « Constitution d’Athènes » découvert en Egypte sur un papyrus en 1879.  
[7] Entre temps, un gouvernement provisoire de transition démocratique expédierait les affaires courantes à partir des principes énoncés dans la Constitution provisoire de transition élaborée lors d’ateliers citoyens. 
[8] La solution ou Le gouvernement direct du peuple ; Exposition abrégée du système phalanstérien de Fourier par Victor Considerant. 1851 p 43